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today ADF Paris Nov. 24, 2016

coup de gueule ADF Paris 2016 · 24 novembre 16 „ Les organismes complémentaires d’Assu- rance maladie (Ocam) sont devenus les pre- miers financeurs du secteur dentaire avec 39% de taux de prise en charge contre 33% pour l’as- surance maladie et 28% pour les ménages. Pa- rallèlement à la montée en puissance des Ocam dans ce financement, un renoncement croissant aux soins dentaire est apparu, ce qui est agité comme un chiffon rouge face à la liberté d’hono- raires des professionnels de santé, dont les den- tistes. Le diagnostic a été posé par les pouvoirs publics : ce sont les pratiques et la probité des professionnels libéraux qui sont en cause. Face à ce diagnostic biaisé et dogmatique, la solution que le gouvernement veut imposer à travers les réseaux de soins conventionnés est pire que le mal et détruit les valeurs de notre système de santé. Les Ocam sont les premiers responsables du renoncement des soins en dentaire Ce système des Ocam est particulièrement coûteux pour l’assuré du fait d’un niveau très ex- cessif de frais de gestion et de marketing de plus de 7 milliards d’euros par an, soit plus de 20% des cotisations. Les dépenses en communication s’élèvent à 2,7 milliards d’euros et les dépenses totales de gestion augmentent de plus de 10% par an soit plus de 700 millions d’euros par an. Alors que tous les acteurs de la santé ont été mis à contribution pour maitriser les dépenses, les Ocam ont maintenu un rythme effréné de dé- penses. Parmi les Ocam, il faut distinguer les ac- teurs, certains étant plus vertueux que d’autres. Ainsi les petites et moyennes mutuelles ont des coûts de gestion de l’ordre de 12% contre plus de 25% pour les grosses structures. Ce système se caractérise aussi par une grande opacité et une carence criante de régu- lation de l’activité commerciale et de protection des assurés. Les garanties des contrats sont li- bellées en pourcentage de tarifs de sécurité so- ciale méconnus des assurés. Aucun assuré ne connaît le tarif de remboursement d’une pro- thèse sur dent visible (107,5 euros). Un contrat qui annonce 100% de remboursement apparaî- tra de bonne qualité pour l’assuré alors qu’il ne financera que 32,25 euros et lassera un reste à charge réel de 642,5 euros en moyenne à l’as- suré. Une faible part des contrats sont dispo- nibles sur internet et la vente axée sur le télé- phone donne une capacité quasi nulle à l’assuré pour choisir un contrat adapté et compétitif. La stratégie de gestion de risque des Ocam les conduit à rembourser faiblement le vrai reste à charge des soins courants coûteux. Les Français ont souscrit en 2015 pour 35 milliards d’euros de contrats d’assurance santé complé- mentaire pour se protéger contre un risque fi- nancier d’accès aux soins. Ce risque financier provient d’un reste à charge après financement par l’assurance maladie obligatoire de 44 mil- liards d’euros et se compose de trois segments : les tickets modérateurs, la partie libre des hono- raires et les soins non pris en charge par l’assu- rance (comme les soins esthétiques). Pour les soins de ville, le seul segment qui puisse entrai- ner un obstacle financier à l’accès aux soins est la partie libre des honoraires. Pour une prothèse dentaire sur dent visible à un prix moyen de 750 euros, la partie libre représente 642,5 euros et peut justifier de s’assurer pour son finance- ment. Or, les Ocam ne couvrent en moyenne que 189 euros de cette somme, laissant un reste à charge conséquent à l’assuré (453 euros). Par contre, les Ocam remboursent la quasi intégra- lité des tickets modérateurs (32,25 euros dans ce cas) qui représente une véritable rente finan- cière pour eux mais en réalité aucun risque pour l’assuré. Ainsi, les Ocam ne font que gérer des flux financiers à leur profit et ne protègent pas du reste à charge élevé dans certains soins liés à la partie libre des honoraires. Faire croire que c’est en baissant simplement cette dernière qu’on règlera le problème est une supercherie qui bénéfice grandement aux Ocam. La solution ne peut venir que d’une réforme structurelle du système de financement que nous avons pro- posé (1). Les réseaux de soins sont incompatibles avec les fondamentaux de notre système de santé Le système de santé français s’appuie sur le triptyque républicain de la liberté, de l’égalité et de la solidarité. Il vise à ce que chaque Français ait accès à la même qualité de prestations en santé, indépendamment de son revenu et de son niveau socio-éducatif. C’est l’opposé de l’ap- proche utilitariste anglaise de l’instauration d’un filet de sécurité public complété par un sys- tème privé individualiste inégalitaire. Parmi d’autres, les raisons suivantes justifient la sup- pression des réseaux de soins conventionnés qui sont incompatibles avec les fondamentaux de notre système de santé. L’instauration d’une médecine à deux vi- tesses, creuset des inégalités dans le soin : la médecine de réseau à faible innovation pour la classe moyenne et la médecine innovante pour les plus aisés. L’équation de base sur lequel le modèle réseau s’appuie, l’apport de volume de patients contre une baisse des prix et un main- tien de la qualité est biaisée. L’opérateur du ré- seau (les plateformes commerciales) n’a aucune compétence ni capacité pour définir et encore moins pour contrôler la qualité des soins déli- vrés. Les réseaux sont la négation de la recon- naissance de l’expertise des professionnels, qui sont considérés comme des prestataires à faible valeur ajoutée individuelle. Le maintien de prix bas sort du marché la plupart des innovations qui seront uniquement accessibles aux plus ai- sés et dont le renouvellement est freiné. Les ré- seaux sont donc contraires à la logique solidaire et égalitaire de notre système de santé. Un affaiblissement des droits fondamentaux de liberté de choix du citoyen en santé : les ré- seaux de soin instaurent un coût, une pénalité financière, à l’exercice du droit fondamental de liberté de choix du professionnel de santé. Le remboursement différencié met fin au libre choix de son professionnel pour la classe moyenne. Une partie de la patientèle devient captive ce qui affaiblit l’efficacité du système qui repose sur une mise en concurrence de pro- fessionnels libéraux à partir du libre choix. Un système inadapté à la gestion du risque en santé au XXIe siècle : le concept de réseau se fo- calise sur le soin et délaisse le maintien en bonne santé de la population. La gestion du risque santé (lié la maladie) au XXIe siècle re- pose sur une gestion en amont de ce risque, tout au long du cycle de vie de l’assuré. Elle donne aussi un rôle actif à l’assuré. La santé bucco-den- taire est un parfait exemple de cette nécessité. C’est une logique incompatible avec les réseaux qui se concentrent sur les soins, après déclen- chement de la maladie, et donne un rôle passif à l’assuré. Instaurer les réseaux de soins à notre époque est une erreur stra- tégique qui condamne l’ef- ficience de notre système de santé. Une remise en cause de l’indépendance profession- nelle : le réseau prend pro- gressivement un poids élevé sur le choix des proto- coles de soins, avec comme seule logique la recherche de coûts faibles. Progressi- vement, le professionnel de santé devient prestataire de services pour le réseau en soignant les patients membres du réseau avec les protocoles décidés par le réseau. Il faut garder en tête que le réseau a vo- cation à être acheteur de soins et à détenir une position dominante. Les produits de santé utili- sés ou prescrits par le soignant sont progressive- ment fournis et choisis par le réseau. En re- vanche, le professionnel qui a « cédé » le contrôle de son activité reste entièrement responsable de ses actes devant les différents tribunaux, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes. Une position politique cynique consiste à installer les réseaux et à faire croire que les fon- damentaux du système de santé français seront préservés. C’est la position prise par les diri- geants politiques jusqu’à aujourd’hui. La Prési- dentielle 2017 doit être l’occasion pour les Fran- çais de trancher en demandant aux principaux candidats de se positionner pour ou contre le principe des remboursements différenciés. Cela donnera aux citoyens une vision claire de ceux qui défendent le modèle français et l’exercice libéral en santé et les autres. Enfin, chaque professionnel de santé doit garder en mémoire qu’il peut être le principal pourvoyeur ou fossoyeur des réseaux de par ses propres décisions. Les réseaux n’existent pas si les professionnels n’y adhérent pas ! Pourquoi les réseaux de soins conventionnés détruiront notre modèle de santé ! © Olivier Le Moal/Shutterstock.com Frédéric Bizard Economiste Sciences Po Paris *Auteur de « Complé- mentaires santé : le scan- dale », Editions Dunod, Janvier 2016 (1)

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